L’innovation, un problème culturel et… politique

Dans le cadre de la conférence Boule de cristal du CRIM, Alan Kay fait l’apologie de l’anticonformisme qui régnait dans l’industrie des TIC au cours des années 1960 aux États-Unis.

Alan Kay, un des pionniers de l’industrie des technologies de l’information et des communications (TIC) ayant contribué à de nombreuses inventions d’envergure, était de passage cette semaine à Montréal, dans le cadre de la conférence La Boule de cristal du CRIM, où il a prononcé une allocution intitulée « Le point critique de la véritable culture informatique ».

M. Kay est un des fondateurs du groupe de recherche de Xerox à Palo Alto, en Californie, appelé PARC, où ont été conçus les concepts d’ordinateurs personnels et de blocs-notes, l’impression au laser, l’interface graphique et la programmation-objet. M. Kay, qui est actuellement président fondateur de Viewpoints Research Institute, un organisme sans but lucratif, a été chercheur principal chez Atari, fellow chez Apple et vice-président R&D chez Disney.

Organisée par le Centre de recherche informatique de Montréal (CRIM), la conférence Boule de cristal a, comme son nom l’indique, pour but d’esquisser les tendances qui modèleront le développement futur de l’industrie des TIC.

M. Kay a souligné, tout au long de sa présentation, et démontré avec force et détails, le manque d’imagination et de réelle créativité qui afflige actuellement l’industrie des TIC. Comme il l’a précisé d’entrée de jeu, « les fournisseurs sont motivés par le marché, fondamentalement, et le marché a des besoins peu sophistiqués », ce qui constitue le cœur même du problème. Rappelons qu’en bonnes institutions capitalistes, les fabricants existent avant tout pour faire de l’argent et non pour changer le monde. Il ne faut donc pas s’attendre à ce qu’ils transgressent les règles et les conventions, à moins que les clients ne le leur demandent expressément.

Mais voilà, la cause profonde du problème est que les clients ne veulent justement pas que les règles et les conventions soient remises en question. Le problème est donc culturel, avant d’être technologique, ce qui nous amène à définir la culture qui est, aux dires de M. Kay, un ensemble de règles et de conventions permettant d’assurer la survie de la société. En somme, des trucs de survie qui ont fait leur preuve au fil des années et que nous conservons collectivement.

Faire abstraction

Or, si nous parvenions à faire abstraction de ces idées préconçues, nous pourrions accéder à un monde de possibilités pratiquement illimitées. Pour illustrer son propos, le professeur a donné l’exemple d’une grenouille qui a été habituée à être nourrie avec des rectangles roses (pourquoi pas ?) et qui est entourée de mouches vertes, mais qui se laissera mourir de faim, parce qu’elles ne sont pas des rectangles roses. Or, c’est seulement si elle parvient à remettre en question ses acquis, qu’elle pourra survivre. Sinon, c’est la mort qui l’attend. En TI, les gens s’accrochent à de vieux concepts, comme le papier.

Le même concept s’applique à la R&D en TIC : il faut être capable de transgresser les acquis pour pouvoir innover. Par conséquent, l’inventeur ne peut être que rebelle, par définition. Dans ce contexte, si on restreint trop sa liberté de pensée, comme le font actuellement les investisseurs et qui veulent maximiser le contrôle qu’ils ont sur les travaux des chercheurs, il ne peut y avoir d’invention significative.

Or, M. Kay soutient que dans les années 1960 les chercheurs bénéficiaient d’une plus grande liberté et pouvaient conséquemment produire des inventions plus extravagantes, donc plus créatives, qu’aujourd’hui. Il soutient que ça prend seulement 50 millions $ US pour inventer un nouveau paradigme informatique et que cet investissement est à la portée de toutes les entreprises listées au palmarès des 100 plus grandes entreprises du magazine Fortune 100. Suffit d’avoir la volonté politique. Le problème est donc aussi politique. Encore et toujours.

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