Bell, Rogers et Telus établissent leurs conditions alors que le CRTC envisage d’étendre le mandat d’accès Internet de gros.

La semaine dernière, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) a lancé une série d’audiences publiques dans le cadre d’un examen de son cadre actuel d’accès de gros d’Internet haute vitesse (IHV). Des grandes entreprises de télécommunications, des petits concurrents et des groupes de défense ont été invités à soumettre des interventions.

Ce processus, lancé l’année dernière, a connu plusieurs développements, notamment un mandat provisoire imposé en novembre dernier aux grandes entreprises de câblodistribution et de téléphonie de l’Ontario et du Québec (Bell et Telus) de partager leurs réseaux de fibre optique jusqu’au domicile (FTTH) avec leurs concurrents afin d’accroître la concurrence.

Le Conseil a estimé que la concurrence avait le plus diminué dans ces deux provinces, mais a suggéré que ce mandat pourrait être étendu à d’autres provinces et rendu permanent.

En conséquence, Bell a annulé un certain nombre d’investissements et a accusé le CRTC d’être responsable de coupes importantes dans ses effectifs, a affirmé Robert Malcolmson, vice-président exécutif et chef des affaires juridiques et réglementaires de Bell Canada, lors de l’audience.

« L’opinion du Conseil selon laquelle il y aurait un ‘risque minimal’ en ce qui concerne les investissements dans la fibre en accélérant l’accès de gros à la FTTH (fibre optique jusqu’au domicile) était complètement erronée. La question, dans cette phase finale du processus, est de savoir si le Conseil va doubler la mise ou s’il va faire une pause et réfléchir à la manière de rétablir les incitations à l’investissement tout en maintenant la vigoureuse concurrence des prix qui se manifeste clairement sur le marché. »

La société a également proposé un certain nombre de conditions si le CRTC imposait l’accès de gros à l’Internet, notamment de ne mandater que des vitesses allant jusqu’à 1,5 Gbit/s et de n’appliquer l’accès FTTH que cinq ans après le déploiement du réseau à un endroit donné. Selon Bell, ces mesures permettraient de réduire l’impact négatif sur les investissements.

Telus a également affirmé que si le CRTC impose un mandat de gros, il devrait être étroitement adapté, par exemple en excluant les zones rurales et éloignées ainsi que la fibre optique enterrée à coût élevé. Un mandat de gros, a-t-elle ajouté, ne devrait pas être accessible aux câblodistributeurs dans leurs propres territoires de desserte, car cela entraînerait à terme la consolidation d’un unique réseau physique, créant des vulnérabilités en cas de catastrophes naturelles, de pannes techniques et autres.

Rogers, quant à elle, a mis en garde le CRTC contre le risque de fausser la concurrence et de compromettre les investissements en recourant à des « mandats de gros excessifs ».

« Le meilleur moyen de garantir des services abordables et de haute qualité pour les consommateurs et les entreprises canadiennes, et de soutenir l’infrastructure numérique dont le Canada a besoin pour rester compétitif face à ses pairs à l’échelle mondiale, passe par une réglementation minimale et des tarifs compensatoires », a indiqué Dean Shaikh, vice-président principal, affaires réglementaires, Rogers.

Les petits concurrents comme Xplore, en revanche, déplorant la diminution de la concurrence, ont soutenu les règles d’accès de gros du CRTC.

« Un écosystème de télécommunications concurrentiel dans les régions rurales du Canada a besoin de fournisseurs d’infrastructure à grande échelle, pour offrir des alternatives significatives et durables », a déclaré Cindy Wallace, conseillère juridique en réglementation chez Xplore. « Le cadre de fibre de gros peut et doit encourager ce résultat. »

D’autres, comme Eastlink, Cogeco et Beanfield, ont demandé que Rogers, Bell et Telus soient exclues de l’accès au régime d’accès de gros, craignant que le mandat ne se retourne involontairement et que les « Trois Grands » n’utilisent leur domination, ainsi que leurs marques secondaires, les fournisseurs de gros acquis et les stratégies de regroupement, pour évincer les opérateurs régionaux et les FAI indépendants.

Enfin, des groupes de défense des intérêts comme le Bureau de la concurrence et le Centre d’appui à la participation des citoyens (PIAC) sont intervenus, fustigeant les grandes entreprises de télécommunications et soutenant les règles d’accès de gros du CRTC.

« Le Conseil a le mandat de réaliser les objectifs de la politique de télécommunications et non de retourner la rente de monopole aux titulaires », a déclaré John Lawford, directeur général et avocat général du PIAC. « Les titulaires intimident le Conseil en utilisant leur définition exagérée de l’investissement comme un atout ultime qui gagne toujours, et il faut simplement leur dire non. »

Les audiences publiques se sont terminées vendredi, et le CRTC a rappelé aux intervenants que la date limite pour soumettre les renseignements supplémentaires demandés est le 1er mars 2023.

L’article original (en anglais) est disponible sur IT World Canada, une publication sœur de Direction informatique.

Adaptation et traduction française par Kevin Plourde.

Ashee Pamma
Ashee Pamma
Ashee est rédactrice pour IT World Canada. Elle a obtenu son diplôme en communication et études médiatiques à l'Université Carleton à Ottawa. Elle espère devenir chroniqueuse après d'autres études en journalisme. Vous pouvez lui envoyer un courriel à apamma@itwc.ca.

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