Le commerce intégré, un concept utopique?

Depuis près d’une décennie, le commerce électronique croit en importance grâce à l’Internet. Pourtant, malgré l’instantanéité de la transmission des données que permet la technologie, l’intégration des affaires numériques et de celles de l’univers « brique et mortier » est loin d’être parfaite.

Le commerce électronique existe depuis une trentaine d’années. Depuis fort longtemps, des compagnies procèdent à l’échange de documents informatisés (EDI) dans un contexte de transactions interentreprises. Dès 1998, au gré de l’adoption de la navigation sur le réseau Internet, bon nombre de commerces virtuels ont « ouvert leurs portes ». Progressivement, des établissements traditionnels ont emboîté le pas, question de ne pas demeurer en reste devant cette manne potentielle de revenus additionnels.

Près de dix ans plus tard, des milliers de commerces « en brique et mortier » exploitent des portails transactionnels où ils offrent leur marchandise détenue soit en entrepôt, soit dans les succursales de leur réseau. D’année en année, les consommateurs adoptent cette méthode pour se procurer des produits à prix avantageux, sinon pour faire l’acquisition de biens qui ne sont pas disponibles au magasin local.

Les commerces de détail ne ratent jamais une occasion de promouvoir leur magasin en ligne, dans le cadre de publicités en ligne, sur des dépliants ou même dans leurs commerces, afin d’inciter les gens à venir y dépenser leurs sous. Certaines vont même jusqu’à offrir une combinaison de services, où les diverses plates-formes de commerce interagissent à l’unisson.

Tout porterait à croire que ces commerces traditionnels ont optimisé au maximum les relations entre leurs boutiques concrètes et leurs boutiques virtuelles. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Malgré l’omniprésence des technologies de l’information, leurs capacités de transmission des données ou d’automatisation des processus, des délais navrants peuvent contrecarrer les espoirs des consommateurs en quête d’efficacité.

Prenons l’exemple d’une chaîne de produits électroniques et informatiques qui offre aux clients le ramassage en magasin des commandes placées en ligne. Le consommateur peut constater, sur le catalogue en ligne, la disponibilité d’un produit dans la succursale de son choix. Il complète sa commande, bien fier de faire une bonne affaire et de joindre l’utile à l’agréable, puis reçoit par courriel une confirmation.

Or, quelques heures plus tard, il reçoit un avis d’annulation de la commande. La raison? Le produit est épuisé dans la succursale choisie. Il contacte alors par téléphone le service à la clientèle, qui l’informe que l’inventaire des magasins est mis à jour à toutes les heures. Déçu, il poursuit ses recherches, mais constate, plusieurs heures plus tard et après une visite dans le magasin sélectionné, que le produit est toujours indiqué sur le Web comme étant disponible dans la succursale choisie!

En magasin, les systèmes informatiques permettent aux vendeurs de savoir combien de produits sont détenus en inventaire, puisque chaque produit vendu est déduit lorsqu’il est présenté à une caisse enregistreuse. Pourquoi l’inventaire affiché sur le Web n’est-il pas mis à jour en temps réel, comme c’est le cas, disons, pour les billets de concert?

Intégration… Quelle intégration?

D’autre part, plusieurs consommateurs peuvent penser que les succursales en brique et mortier peuvent les aider en cas de problème avec un produit acheté en ligne. Si certains établissements offrent un tel service, la situation n’est pas généralisée.

Ainsi, plusieurs consommateurs se sont fait sèchement dire par des commis ou des vendeurs en succursale qu’ils devaient contacter l’entreprise via le site Web et retourner leurs produits par la poste ou par messagerie, parce que « ce n’est pas leur problème ». Il est possible que les ventes en ligne causent à ces représentants des frustrations, en raison de ventes potentielles perdues, mais le consommateur, lui, sera décidément frustré de constater le manque de volonté et de « synergie » entre les deux canaux de commerce.

Encore, faudrait-il que certaines entreprises intègrent véritablement leurs canaux. Par exemple, un magasin à rayon qui est en affaires depuis plus d’une centaine d’années, qui exploite un catalogue pour les commandes par téléphone ainsi qu’un site Web pour les commandes en ligne, n’intègre pas ces composantes. Impossible de savoir si un produit est disponible dans une succursale, ni de connaître son numéro d’identification.

De plus, non seulement la disponibilité des produits peut varier d’un canal de vente à un autre, mais les prix peuvent être différents. Un disquaire, par exemple, a déjà annoncé un disque à prix moindre sur le Web, sans indiquer clairement que le prix n’est valable qu’en ligne, et non dans ses succursales. De quoi confondre le client en quête de la façon la plus rapide et la plus abordable d’obtenir le produit souhaité.

Le commerce électronique, à ses débuts, était présenté comme un canal additionnel de vente pour les commerçants. Il était également présenté comme étant un moyen rapide et efficace d’obtenir des produits. Or, si les divers canaux ne fonctionnent pas « main dans la main », le consommateur peut garder un goût amer de son expérience d’achat en ligne.

Espérons que les commerces qui n’ont pas intégré de façon optimale leurs canaux réels et virtuels, et qui cherchent constamment à augmenter leurs ventes et leurs profits, investiront temps et argent pour assurer la meilleure expérience d’achat aux consommateurs. Car un client perdu est difficile à retrouver, surtout s’il va magasiner ailleurs sur la Toile…

Jean-François Ferland
Jean-François Ferland
Jean-François Ferland a occupé les fonctions de journaliste, d'adjoint au rédacteur en chef et de rédacteur en chef au magazine Direction informatique.

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