Fusion Rogers-Shaw : un aperçu des conditions légales et de ce que disent les détracteurs 

Le ministre de l’Industrie, François-Philippe Champagne, a approuvé vendredi dernier le transfert des licences de spectre de Freedom Mobile à Vidéotron, poussant la fusion historique Rogers-Shaw au-delà de la ligne d’arrivée. 

Mais le ministre Champagne a également montré les dents, annonçant un total de 21 conditions légales que Rogers et Vidéotron doivent respecter sous peine de sanctions financières colossales. 

L’objectif de ces conditions est d’améliorer la concurrence et de réduire les prix dans le secteur des télécommunications, a-t-il précisé. 

Mais les critiques ont afflué sur Twitter et d’autres plateformes pour exprimer leur déception face à un verdict qui n’a pas surpris. 

Le député néo-démocrate Brian Masse a commenté la décision vendredi matin : « Aujourd’hui, c’était une concession à bien des égards aux géants des télécommunications, et nous allons voir moins de concurrence, des prix plus élevés et nous allons voir des frustrations continues pour les Canadiens au fur et à mesure que les choses progressent. » 

Selon le fournisseur d’accès Internet (FAI) indépendant TekSavvy, l’un des critiques les plus virulents de la fusion, « Shaw et Freedom ne sont que les derniers dominos à tomber dans l’effondrement rapide et continu de la concurrence dans le secteur des télécommunications au Canada. » 

Pendant ce temps, Rogers et Vidéotron se sont réjouis de leur grande victoire et ont réaffirmé les engagements imposés par Champagne : 

Pour Rogers : 

  • Investir 1 milliard de dollars canadiens pour améliorer la connectivité des communautés rurales, éloignées et autochtones, 2,5 milliards de dollars canadiens et 3 milliards de dollars canadiens pour étendre son réseau 5G et améliorer la technologie et les services de réseau, respectivement dans l’Ouest canadien. 
  • Établir un siège social de Rogers et créer 3 000 nouveaux emplois dans l’Ouest canadien, à maintenir pendant 10 ans. 
  • Étendre le programme Internet Connected for Success aux Canadiens admissibles de l’Ouest canadien et introduire une version sans fil du même programme à l’échelle nationale pour les Canadiens admissibles. 
  • Honorer un engagement de prix de cinq ans pour les clients de Shaw Mobile. 

Pour Vidéotron : 

  • Offrir des forfaits comparables à ceux actuellement disponibles au Québec et offrir des options au moins 20 % moins chères que celles offertes par les grands joueurs. 
  • Impossibilité de transférer les licences Freedom Mobile pendant une période de dix ans. 
  • Étendre son réseau 5G sur le territoire d’exploitation de Freedom Mobile d’ici deux ans. 
  • Étendre le service mobile au Manitoba grâce à l’utilisation d’un accord signé avec un opérateur de réseau mobile virtuel (MVNO). 
  • Augmenter les allocations de données des clients Freedom Mobile existants de 10 %. 

En énumérant ces conditions, le ministre Champagne a déclaré : « Je ne plaisanterais pas avec le régulateur. Ce n’est jamais une bonne chose. Non seulement vous avez un contrat avec des conditions, mais en plus, pensez aux pénalités. » 

Conséquemment, le ministre a annoncé que Rogers et Vidéotron paieront des dommages-intérêts de 1 milliard de dollars canadiens et de 200 millions de dollars canadiens, respectivement, si l’un ou l’autre violait l’un des engagements. Cela, a déclaré le ministre, est « sans précédent dans l’histoire canadienne des dommages-intérêts forfaitaires ». 

Mais pour Michael Geist, professeur de droit de l’Internet à l’Université d’Ottawa, toutes les « déclarations fermes » sur les dommages ne sont « qu’une distraction insignifiante des problèmes de concurrence du Canada », ajoutant que le verdict est rempli de contradictions – Champagne affirme que la fusion entraînera plus de concurrence, mais l’exige dans un contrat et menace ensuite de punir et de mobiliser plus de pouvoirs si les prix ne baissent pas. 

Une autre contradiction de ce type, selon Geist, est la décision du ministre Champagne de geler les transferts de spectre. Il a soutenu dans un tweet : « Si les fusions sont si importantes, pourquoi est-il nécessaire de geler les transferts de licences maintenant ? » 

Il a ajouté dans un article de blog que Champagne cherche à « fermer la porte de la grange après que les chevaux soient sortis, le marché est consolidé et les concurrents ont disparu ». 

En effet, plusieurs petits joueurs se sont fait avaler par des géants des télécommunications au cours de la dernière année, dont Ebox, Distributel et Primus par Bell, V-Media par Vidéotron, et Start.ca et Altima par Telus, entre autres. 

TekSavvy a également soutenu que le ministre Champagne avait approuvé la fusion malgré l’enquête en cours du CRTC sur les tarifs de gros préférentiels accordés par Rogers à Vidéotron.  

Peter Nowak, vice-président de la perception et de l’engagement de TekSavvy, a déclaré dans un tweet vendredi matin : « Le fait que le gouvernement ait approuvé une fusion qui aurait été le coup d’éclat le plus simple et le plus populaire imaginable est très inquiétant. Y a-t-il quelque chose qu’ils ne feront pas pour ces entreprises ? » 

L’article original (en anglais) est disponible sur IT World Canada, une publication sœur de Direction informatique. 

Adaptation et traduction française par Renaud Larue-Langlois. 

Ashee Pamma
Ashee Pamma
Ashee est rédactrice pour IT World Canada. Elle a obtenu son diplôme en communication et études médiatiques à l'Université Carleton à Ottawa. Elle espère devenir chroniqueuse après d'autres études en journalisme. Vous pouvez lui envoyer un courriel à [email protected].

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