En tant qu’entrepreneur copropriétaire de Miralupa, un studio de création de jeux, d’applications et d’expériences en réalité augmenté, de secrétaire du CA et de nouveau directeur général d’Alliance numérique, et faisant suite à de récents voyages à Dublin, Cologne, Beijing et Shanghai pour y faire de la représentation et annoncer des investissements, je me devais de faire dans mon premier billet un « état de la situation » quant au positionnement de l’industrie québécoise du jeu vidéo, à la suite des turbulences non négligeables qui sont survenues ici et ailleurs en 2012 et 2013, des récentes annonces gouvernementales et de la couverture médiatique sous-jacente.Illustration du concept d'industrie du jeu vidéo

Même si vous ne suivez pas spécifiquement l’industrie, vous avez probablement entendu parler d’importantes pertes d’emploi à Montréal en début d’année. Mais c’est pareil ailleurs partout sur la planète, par des réorganisations et des délocalisations chez la plupart des grands développeurs et éditeurs de jeu, et ce à quelques exceptions près.

Par exemple, près de chez-nous, à Montréal le bal des mauvaises nouvelles a commencé en août 2012 lorsque Funcom, basée à Oslo, en Norvège, a réduit son personnel partout dans le monde incluant à son studio de Montréal, qui comptait alors près de 150 employés. Cette première opération minceur s’est poursuivie avec d’importantes coupures et fermetures de studios au début de 2013 à Montréal.

À la fin de janvier, c’est Funcom à nouveau qui réduisait son équipe de façon très substantielle. Sont survenues ensuite les fermetures en février et en mars de Visceral Games et Playing Mantis (anciennement EA mobile) d’Electronic Arts (EA), qui n’a gardé que la division Bioware officiellement active ici.

Ailleurs, dans de plus petits studios, les embauches ont cessé et certains ont effectué des coupures. Les gens ont commencé à se questionner sur ce qui se passait dans l’industrie ici et sur l’avenir des emplois dans le secteur, avec ces quelques 500 emplois perdus (selon mes estimations personnelles à ce sujet, faute de données officielles).

Il faut toutefois relativiser ces données face à la perspective globale des emplois créés et perdus au niveau provincial et pancanadien – voir la suite de ce billet la semaine prochaine – dans le contexte où l’industrie emploierait malgré tout plus de gens en 2013 qu’en 2012.

Cependant, ce n’est pas qu’ici que les choses ont été difficiles : c’est un peu partout que des emplois ont été perdus à la suite de fermetures de studios et de coupures de postes. Les choses sont un peu plus faciles en Asie, où certains des emplois perdus ont été relocalisés ailleurs.

Studios fermés dans le monde depuis 2012
(N.B. : les estimations ici varient en précision d’un cas à l’autre) :

  • PopCap (EA) à Dublin en septembre 2012 (100 emplois)
  • Junction Point (incluant Warren Specter de Epic Mickey) et Lucas Arts (Disney) à Austin et LA en avril 2013 (400 emplois)
  • Pop Cap et Quicklime (EA) à Vancouver en avril 2013 (300 emplois)
  • Silicon Knights à London en Ontario à la suite de démêlées judiciaires persistantes avec Epic Games en mai 2013 (100 emplois)
  • Zynga, a éliminé 520 emplois sur 2 900 et fermé 3 bureaux à New York, LA et Dallas en juin 2013
  • Le 21 août dernier, Big Fish a fermé son bureau de Vancouver et mis à pied des gens à Seatle (65 emplois)
  • Plusieurs autres ont fermés ou été vendus en pièces détachées, incluant Atari et THQ

Dans cette foulée, Montréal a bien failli perdre le studio de THQ et 180 emplois, mais la division montréalaise de celle-ci a été rachetée par Ubisoft en janvier 2013. S’en est suivi une saga judiciaire entre Patrice Désilets, le directeur créatif du studio THQ de Montréal et créateur du premier Assassin’s Creed et 1666, et Ubisoft pour une seconde fois (mais je n’embarquerai pas dans ce débat…).

Dans la suite de ce billet, je traiterai des investissements publics et privés qui ont permis de bâtir une industrie du jeu vidéo au Québec.