Aider à l’aide des technologies… et des gens

Grâce à la réseautique, les prestataires de services d’assistance informatique ont sous la main divers outils de communication et d’accès aux connaissances pour dépanner plus efficacement les utilisateurs. Néanmoins, ils constatent que le téléphone est encore bien ancré dans les moeurs de ces derniers.

L’assistance aux utilisateurs des technologies de l’information, communément appelée support informatique, a vécu de près l’évolution des TIC des dernières années qui s’est façonnée sous le signe de la réseautique. Si les moyens d’interaction et d’information facilitent la résolution des problèmes et le partage des connaissances, le bon vieux téléphone persiste.

Grâce au réseau informatique, l’interaction entre les préposés au support informatique et les utilisateurs n’est plus la même. Avec la prise de contrôle à distance du poste de travail, en popularité croissante, les explications incompréhensibles et les visites vers le bureau de l’employé sont moins fréquentes. Autrement, la communication et l’accès à l’information peuvent être facilités par l’entremise d’outils d’échange et par le recours aux contenus en ligne, pourvu qu’ils soient employés par les utilisateurs.

Le Groupe CGI exploite en impartition des centres d’assistance pour le compte d’organisations clientes. Benoît Godmaire, le vice-président au soutien informatique aux utilisateurs, indique que le partage des bases de connaissances, par exemple les foires aux questions, est en progression. Il considère également que les différents moyens de contact à distance rapprochent davantage l’entreprise des besoins du client en comparaison avec l’époque du téléphone.

Il remarque toutefois que le taux d’adoption de ces nouveaux moyens n’est pas aussi élevé que souhaité, et estime qu’il varie en fonction des types de clientèles.

« Les employés qui sortent des universités sont beaucoup plus à l’aise de faire les choses par eux-mêmes, alors que les gens qui sont en place depuis plus longtemps sont plus à l’aise avec le téléphone qu’avec le poste de travail, indique M. Godmaire. Il commence à y avoir un changement graduel et un meilleur taux d’adoption, mais pas autant que les (firmes d’analyse) de ce monde peuvent nous le dire. »

Utiliser le réseau

D’autre part, les moyens d’interaction par la réseautique, bien que plus pratiques que le téléphone, joueraient un rôle complémentaire dans une interaction encore fortement humanisée, à condition que l’utilisation de ces outils soit permise au sein des organisations.

Marie-Pier St-Hilaire est présidente-directrice générale de AFI Formation, une entreprise de formation de Québec qui, en plus d’offrir une assistance aux personnes qui suivent ses cours, fournit des services d’assistance informatique à une clientèle surtout formée d’organismes gouvernementaux. Elle estime que le courriel est utilisé comme moyen de communication dans 80 % des cas.

« Les moyens de communication comme le courriel ou le « chat » vont être utilisés pour envoyer la “recette” pour la résolution du problème, mais les gens ont encore besoin de parler avec quelqu’un par téléphone parce qu’ils ont l’impression que le problème va se résoudre plus rapidement, indique-t-elle.

« Par contre, le clavardage et la messagerie instantanée ne sont pas accessibles dans certaines organisations en raison des brèches en matière de sécurité qu’ils peuvent entraîner. Toutefois, il existe du clavardage qui est utilisé seulement à l’interne chez un client pour le support de niveau 1 et 2, qui est de plus en plus utilisé », ajoute-t-elle.

Les éditeurs de solutions de centres d’assistance constatent aussi la valeur ajoutée que peuvent procurer les moyens d’interaction par la réseautique en termes d’efficacité accrue. CPL Technologies, une entreprise de Laval, a notamment misé lors de la commercialisation d’un logiciel en 2000 sur le recours au courriel et à une interface Web pour permettre aux utilisateurs de communiquer leurs besoins au centre de soutien informatique. Un questionnaire dynamique permet également d’obtenir des informations et d’établir un meilleur diagnostic de base, tout en réduisant l’intervention de l’agent.

« Les gens sont de plus en plus des utilisateurs de l’informatique, dont le but est de diminuer les appels téléphoniques et d’augmenter le service à la clientèle, constate le président Jean-Claude Desaulniers. Par exemple, il y a une tendance à pousser l’utilisation de l’interface Web auprès des utilisateurs pour qu’ils puissent saisir leurs demandes et en suivre l’évolution en ligne.

« L’utilisation de ces outils permet d’éviter de laisser des messages dans une boîte vocale, ou d’attendre en ligne 45 minutes quand on leur fait entendre (le message) « votre appel est important pour nous… », ajoute-t-il.

Bénéfices en arrière-boutique

La réseautique offre également des possibilités accrues aux exploitants des centres d’assistance informatique en matière d’accessibilité aux connaissances.

« La recherche d’informations est grandement facilitée avec Internet, alors que des outils de gestion documentaire personnalisée permettent de faire des recherches dans des forums de discussion et de clavardage à l’aide de mots-clés. Cela facilite beaucoup la résolution de problèmes d’exception qui demandent un gros travail et tombent souvent en niveau 2. Nous utilisons aussi les forums de discussion en direct des manufacturiers, pour dépanner plus facilement les gens sans vraiment nous déplacer », indique Mme St-Hilaire.

« De plus en plus d’entreprises offrent des bases de connaissances qui répertorient des problématiques et des solutions qu’on peut acheter, louer ou utiliser à la pièce, qu’une organisation qui possède un logiciel de service aux utilisateurs peut accéder pour offrir un meilleur service. Des logiciels de centre d’appel permettent aussi de créer sa propre base de connaissances qui s’alimente automatiquement à chaque fois qu’on répertorie un problème et qu’on documente une solution, et qui devient dans le système un élément disponible à tous les techniciens », explique M. Desaulniers.

Toutefois, ce dernier souligne que la gestion des connaissances exige un suivi constant. « Il faut s’assurer de la qualité de l’information et un suivi doit être effectué régulièrement. Il faut que ce soit bien fait et bien maintenu, car il peut s’y accumuler trop d’information qui ne sera pas toujours pertinente », conseille-t-il.

« Il faut être bien organisé et avoir des standards pour définir notre base de connaissances afin qu’elle soit efficace. Si on accumule une somme épouvantable d’information qui n’est pas bien gérée, on obtient l’effet contraire de celui qui est souhaité. »

Par ailleurs, comme dans d’autres domaines, les exigences reliées à l’assistance aux utilisateurs peuvent inciter une organisation à opter pour l’impartition.

« Les entreprises sont capables d’implanter des portions de meilleures pratiques, mais n’auront pas le capital pour investir dans des outils qui les aideront à être plus efficaces pour la gestion des effectifs, la prise de contrôle ou la gestion de base de connaissances. En tant qu’impartiteur, à cause de notre masse critique, nous sommes mieux équipés au niveau des pratiques et des outils, et nous pouvons offrir et maintenir une qualité de service à moindre coût », indique M. Godmaire.

De l’efficacité et de la rigueur

L’avenir de l’assistance aux utilisateurs, outre une croissance du recours aux outils informatiques par les utilisateurs, pourrait être le théâtre d’une vague d’optimisation des processus.

M. Godmaire s’attend à ce qu’il y ait un resserrement de la prise des compétences détenues dans les services de terrain pour les ramener de façon centralisée et qu’elles soient mieux documentées. « On misera aussi sur le transfert des compétences d’un appel ou d’un contact à un autre, indépendamment de l’endroit où (l’utilisateur) se trouve ou de sa façon de communiquer », prédit-il.

Marie-Pier St-Hilaire, de son côté, remarque que les centres d’appels sont mis au défi d’être plus efficaces au niveau des processus de travail. Dans le contexte de la modernisation des façons de faire, alors que sa clientèle gouvernementale revoit ses processus, elle estime qu’il y aura sous peu une modernisation des centres d’assistance qui misera sur le transfert des appels « au bon endroit ».

« Au départ, on demandait au niveau 1 d’être excessivement polyvalent et de ne pas avoir de spécialité. Le courant s’aligne vers l’utilisation d’outils ou de technologies qui redirigeront les appels, comme on le vit chez les entreprises de téléphonie, ce qui permettra d’éliminer une couche et d’en réutiliser les ressources qui seront affectées à des spécialités… Mais les utilisateurs auront encore besoin de finir (leurs requêtes) avec quelqu’un », prédit-elle.

M. Desaulniers, pour sa part, remarque une tendance à ramener la connaissance au niveau zéro, pour limiter le nombre d’appels transmis aux techniciens de niveau 3. « C’est pourquoi beaucoup d’entreprises ont mis beaucoup d’emphase sur la gestion de la connaissance pour diminuer ces escalades parce qu’il ne s’agit pas du même personnel…Et du même coût. Il y a un souci d’offrir un bon service, mais aussi de garder l’appel au plus bas niveau possible. Si des entreprises étaient capables de laisser quasiment le client trouver lui-même sa propre solution, ce serait la méthode la plus économique. »

D’ailleurs, M. Desaulniers souligne également l’émergence du cadre de travail ITIL (IT Infrastructure Library) qui documente les meilleures pratiques pour l’exploitation d’un centre de support informatique aux utilisateurs de haute qualité. Dix ensembles de procédures de gestion sont ainsi traités, dont la gestion des incidents, des problèmes, des mises à niveau et des demandes de changements.

« On remarque, au Québec, que les gens s’intéressent de plus en plus à cette nouvelle méthodologie et que des entreprises prennent le virage pour intégrer certains des processus, surtout parmi les cinq premiers qui ont trait au service et au support. Maintenant, est-ce que ça va durer, ou est-ce que ce sera passager comme ISO? C’est une autre paire de manches… »

Jean-François Ferland
Jean-François Ferland
Jean-François Ferland a occupé les fonctions de journaliste, d'adjoint au rédacteur en chef et de rédacteur en chef au magazine Direction informatique.

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