Academos: les TI au service du cyber-mentorat

Depuis une dizaine d’années, Academos aide des jeunes dans leurs choix de carrière en les mettant en cyber-relation avec des bénévoles qui les guident et les informent sur les réalités du monde du travail. Grâce à un système de messagerie électronique interne à son site Web, Academos a développé le concept du cyber-mentorat, réputé efficace pour faciliter le choix de carrière et la persévérance scolaire. Catherine Légaré, fondatrice et directrice du développement d’Academos, raconte.

Pendant ses études de doctorat en psychologie, Catherine Légaré s’est intéressée à la psychologie en éducation et plus particulièrement à la persévérance scolaire et aux moyens à mettre en place pour inciter les jeunes à poursuivre leurs formations. En guise de travail étudiant, elle formait des retraités à l’utilisation d’Internet dans le cadre du programme Internautes Poivre et sel. « Les aînés que je rencontrais cherchaient à savoir ce qu’Internet pouvait leur apporter au-delà d’envoyer des courriels à leurs petits enfants et de jouer au bridge avec leurs amis. On était à la fin des années 90 ; le Web n’en était encore qu’à ses premiers balbutiements, se souvient-elle. Mais je voyais déjà le potentiel d’Internet comme moyen de communication au service de projets d’intervention sociale. J’ai donc orienté mes études de doctorat autour de ce sujet. Ma thèse n’est pas restée sur les tablettes, car de fil en aiguille, elle s’est concrétisée pour devenir Academos. Le modèle sur lequel repose aujourd’hui le service a été sérieusement évalué et très bien documenté. »

Academos emploie une équipe de 19 personnes, 9 administrateurs et employés de soutien installés dans les locaux de la Corporation Educentre de Bois-de-Boulogne, sans oublier 10 agents de développement régional disséminés aux quatre coins du Québec. Ces agents de développement s’occupent d’intéresser et d’accompagner les écoles et leurs élèves afin qu’ils profitent pleinement d’Academos. Ils s’affairent par ailleurs à recruter des entreprises et des professionnels susceptibles d’investir du temps en tant que cyber-mentors.

« Tout ça repose beaucoup sur le bénévolat et la collaboration de la communauté, souligne Catherine Légaré. Nos cyber-mentors sont des bénévoles. Ils sont plombiers, médecins, policiers, profs de physique… En tout, 2000 bénévoles participent au service. Cette année, pas moins de 14 000 élèves dans 300 écoles secondaires devraient utiliser Academos sur la base des six premiers mois du calendrier scolaire. »

Ayant reçu une subvention de 2,7 millions $ du Secrétariat à la jeunesse, dans le cadre de la Stratégie d’action jeunesse, Academos a beaucoup concentré ses efforts auprès des élèves de 3e, 4e et 5e secondaire ces dernières années.

« Les jeunes utilisent Academos dans le cadre de leurs cours, explique Catherine Légaré. Il faut leur expliquer ce que c’est, quelle est la différence entre un mentor et un conseiller en orientation, ce qu’ils peuvent en tirer, etc. Ils réalisent vite que le cyber-mentorat offre une rencontre personnalisée et un réel accompagnement. Ce sont les jeunes qui font les premiers pas. On les accompagne dans le processus qui souvent les intimide de prime abord. Tout se passe sur Internet et étant donné que nos services s’adressent à des jeunes de moins de 18 ans, nous avons développé des services hautement sécuritaires. Chaque utilisateur est identifié par un pseudonyme. »

L’échange de courriels ou de numéros de téléphone entre cyber-mentors et étudiants est interdit. Les messages échangés sur le système sont contrôlés. Un outil de recherche interne sera éventuellement ajouté au système afin de détecter la présence de certains termes ou mots clés inappropriés.

À l’ère de Facebook, de Twitter et des textos, ce modèle d’échange par courriel en mode différé convient-il vraiment aux jeunes? « Internet évolue, c’est certain, et nous tentons de suivre cette évolution, répond Catherine Légaré. Ceci dit, être à la page est une chose, mais nous devons composer avec des enjeux de sécurité importants. Quand les communications s’effectuent en temps réel, comment peut-on suivre et s’assurer qu’elles se déroulent de manière sécuritaire? Nous avons développé un partenariat avec la Fédération des comités de parents et vous pouvez être sûrs qu’ils se préoccupent de la sécurité et souhaitent s’assurer qu’Academos ne connaîtra pas les mêmes genres de dérapage que l’on a vus avec Facebook. »

En 2010, Academos étendra son intervention auprès des jeunes du collégial en adoptant cette fois-ci un modèle d’affaires différent. Les cégeps doivent souscrire à un abonnement annuel au service pour que leurs élèves y aient accès. Une dizaine d’établissements participent au projet-pilote: FX Garneau, Marie-Victorin, Drummondville, Limoilou, Montmorency, Outaouais, Vanier, Ahuntsic, Victoriaville, Maisonneuve, Valleyfield et Bois-de-Boulogne. Plusieurs de ces collèges offrent des programmes de formation en informatique.

« Les jeunes ont tendance à s’intéresser aux métiers qu’ils voient dans leur quotidien, souligne Catherine Légaré. En matière de TI, le quotidien des jeunes, c’est Facebook, les jeux vidéo, le téléphone mobile… Les mentors dans le domaine des jeux vidéo, par exemple, sont en demande. Nous avons déjà quatre animateurs 3D et ils sont tous très sollicités. Ce n’est malheureusement pas le cas de toutes les professions en TI ».

Pour assurer une bonne représentation des métiers en TI, Academos collabore avec plusieurs entreprises et organisations du secteur: TechnoMontréal, Emploi Québec, TECHNOCompétences, Ubisoft et CGI pour n’en nommer que quelques-unes.


Éric Gagnon, cybermentor

Aujourd’hui analyste d’affaires en TI, Éric Gagnon oeuvre comme cybermentor depuis les débuts d’Academos.

Quand on lui demande pourquoi, il répond: « Parce que j’ai eu tellement de misère à trouver ma voie. J’aurais tellement aimé rencontrer desgens qui pratiquaient les métiers qui m’intéressaient. J’avais seulement des descriptions théoriques qui ne m’inspiraient pas beaucoup. Personne dans ma famille ne s’intéressait à l’informatique à l’époque, sauf un cousin que je ne voyais qu’une ou deux fois par année », dit-il.

Il assure que son rôle est très simple: « J’attends de recevoir un courriel du site Academos qui m’invite à répondre au message d’un étudiant. À ma pause ou en soirée, je vais sur le site pour lire son message et je lui réponds. En général, ça commence par une question, mais ensuite ça peut se développer sur quelques jours ou quelques semaines. Mon plus long échange a duré deux ans.

Éric Gagnon soutient que sa participation à Academos l’a beaucoup fait réfléchir sur son métier. « Ça me permet de partager avec d’autres mes impressions, mes découvertes, mes trucs. Ça me permet surtout d’être utile, de sentir que je peux faire une différence dans la vie de quelqu’un. Beaucoup de jeunes pensent qu’une fois qu’on a choisi un métier, on est coincé avec pour le reste de notre carrière. C’est absolument faux. Je suis moi-même passé par bien des chemins pour aboutir à ce que je fais actuellement et rien ne garantit que je vais toujours être analyste dans 20 ans. Il y a plein de stéréotypes comme ça que j’aime briser pour libérer le jeune, pour lui permettre de voir d’autres possibilités. »

Avis aux intéressés, Academos recherche des professionnels des TI intéressés à joindre son panel de cybermentors. « Nous cherchons notamment des femmes car il n’existe pas encore beaucoup de modèles susceptibles de donner aux filles le goût d’aller dans ce secteur, déplore la fondatrice Catherine Légaré. C’est difficile pour les filles de s’imaginer dans une carrière qu’elles ne connaissent pas et où l’on n’a que très peu de modèles féminins », dit-elle.

S’invertir en tant que cyber-mentor au sein d’Academos n’est guère exigeant. Selon un sondage réalisé auprès de ses participants, quelque 80 % des cyber-mentors n’y consacrent que 15 à 30 minutes par semaine.

Catherine Légaré précise que les professionnels peuvent répondre de leur lieu de travail ou de la maison, à l’heure qui leur convient. « Il faut avoir le goût de parler de son métier et d’être en contact avec les jeunes. Chose certaine, l’expérience est motivante et stimulante pour les deux parties », dit-elle.

Academos recherche aussi des professionnels des TI établis hors des grands centres urbains. « Dans les premières années d’Academos, se souvient Catherine Légaré, un jeune de la Gaspésie m’avait contacté parce qu’il envisageait une carrière dans l’univers du jeu vidéo. Avant de déménager pour suivre une formation coûteuse, lui et ses parents souhaitaient mieux connaître les possibilités d’emploi dans ce domaine. Les professionnels en TI qui oeuvrent en région sont les mieux placés pour témoigner de leur expérience et accompagner les jeunes. Cela peut inciter un jeune vivant en région de changer de domaine de carrière croyant, à tort, qu’il n’y a pas de possibilité de trouver un emploi là où il habite. Academos peut combler cette lacune. »

En 2009, Academos, la Corporation Éducentre de Bois-de-Boulogne et son partenaire technologique Skytech communications ont remporté un OCTAS dans la catégorie « les technologies au service de la société. »

Après 10 ans d’activité, le modèle d’Academos basé sur l’entraide et le partage a fait son petit bonhomme de chemin, si bien que quelques-uns des premiers jeunes qui ont profité du service s’inscrivent maintenant comme cyber-mentor, afin de… donner au suivant!

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