Les conditions du futur

DROIT et TI – Les conditions touchant la vente en ligne, l’utilisation d’un site ou la confidentialité sont des textes longs à lire et que bien peu de gens lisent. Et pourtant, ils lient le client qui achète en ligne! Qu’est-ce que le futur nous réserve?

Vous savez déjà que l’arrêt Dell c. Union des consommateurs a établi la validité du contrat en ligne en droit québécois, en matière de commerce électronique notamment. Vous savez aussi probablement que cette décision de la Cour suprême du Canada a confirmé la validité des conditions en ligne qui sont portées à la connaissance du client (que nous nommerons les « conditions connues »); la même décision a confirmé que le client était aussi lié par les clauses du site n’ayant pas été expressément portées à sa connaissance (que nous nommerons les « autres conditions »), mais auxquelles les conditions connues réfèrent avec un minimum de clarté.

Vous savez aussi sans doute que bien peu de gens lisent les conditions en ligne, qu’il s’agisse de conditions connues ou d’autres conditions. Un conférencier disait récemment, lors d’un congrès auquel j’ai assisté, que pour lire toutes les conditions en ligne des sites Web avec lesquels l’on fait affaire, une
quinzaine de jours ouvrables par année seraient nécessaires…
Le résultat, c’est qu’un marchand en ligne a l’occasion de se créer un univers juridique de toutes pièces.

Magasin traditionnel et magasin virtuel

Quand l’on visite un magasin traditionnel, l’on a une idée approximative du régime juridique applicable. L’on sait approximativement les conséquences juridiques de, par exemple :
• l’achat d’un produit qui ne fonctionne pas bien ou qui est endommagé;
• un accident par lequel l’on endommage un meuble ou un produit du magasin;
• un accident par lequel l’on se blesse sur un meuble ou un luminaire du magasin.

Les règles de base touchant de tels évènements existent depuis belle lurette. Mais qu’en est-il lorsque l’on achète en ligne?

À l’extrême, au sens strictement juridique, il serait possible d’inclure par exemple dans les conditions de vente une clause inhabituelle prévoyant qu’en sus des frais relatifs à la marchandise achetée, un frais mensuel facturable pour le support ou le service serait chargé au client au cas où il en aurait besoin. Lorsque je porte mon chapeau de consommateur, j’ai régulièrement cette hantise qu’une clause de paiement supplémentaire soit cachée au milieu d’un long texte de conditions, et que je trouve sur mon relevé de carte de crédit un frais unique ou récurrent dont je n’ai pas pris connaissance.

Si la transaction se fait en droit québécois, il y aurait sans doute manière de contester un
tel frais caché en invoquant les règles du Code civil du Québec touchant le contrat d’adhésion ou celles de la Loi sur la protection du consommateur, mais une telle contestation constituerait un investissement important de temps et d’énergie.

Création de la confiance

Or, l’une des embûches les plus importantes au commerce électronique est justement le manque de confiance du consommateur.

Pour compenser le risque et favoriser le commerce en ligne, j’ai déjà entendu des confrères avocats spécialistes en technologies de l’information évoquer un souhait : qu’une norme quant aux conditions d’utilisation émerge chez les entreprises vendant sur Internet. Le consommateur serait sans doute rassuré de lire que les conditions de vente applicables à son achat sont les conditions uniformes approuvées par un organisme reconnu, comme le Conseil québécois du commerce de détail. Le consommateur pourrait alors lire ces conditions une fois, les connaître, savoir que quelqu’un d’autre qui connaît bien le domaine les a lues et acheter avec un niveau supérieur de confiance.

Pour ma part, je suis entièrement d’accord avec cette volonté et je souhaite tout autant que quiconque une telle cohésion entre les vendeurs, mais j’ai des doutes quant à sa faisabilité.
Je tends cependant à croire qu’à l’intérieur du marché du commerce électronique se dessinera des profils de marchands « conciliants » ou non, tout comme c’est le cas actuellement dans le cas des magasins traditionnels.

Parmi les magasins traditionnels, vous savez fort bien qu’il existe de ces magasins où l’on vend de façon très dynamique, à prix alléchant et où peuvent se dresser des défis tels que s’assurer que le produit en vente est bel et bien en stock et échanger facilement un produit défectueux. Vous savez aussi qu’il existe de ces magasins où l’on vend de façon plus détendue, à prix un peu plus élevé certes, mais avec moins de problèmes pour, notamment, trouver le produit en vente et le remettre pour échange en cas de problème.

Les clients de profils différents fréquentent des magasins de profils différents. Je crois que cela nous attend aussi en commerce électronique. Et la réputation deviendra alors plus importante que le droit, ce qui est souhaitable quand l’on fait affaire à distance pour un bien de valeur modeste.

Michel A. Solis
Michel A. Solis
Michel A. Solis est avocat, arbitre et médiateur. Il oeuvre dans le secteur des TI depuis plus de 25 ans.

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