Et si Hewlett-Packard était devenue une proie ?

HP étant en difficulté provisoire en raison du départ de Mark Hurd, toutes les spéculations sur son avenir se font entendre dans la blogosphère, incluant celle où ce joyau de la Silicon Valley pourrait se faire avaler. Possibilités ou élucubrations ?

Avec le départ horriblement coûteux du PDG Mark Hurd, la multinationale Hewlett-Packard se retrouve encore une fois sans navigateur au gouvernail avec plein de mécontents qui lui intentent (ou intenteront des poursuites). La géante de Palo Alto qui, au fil des années, a acheté plus d’une centaine de boîtes dont Palm, 3Com, EDS, Mercury Interactive, Compaq, Apollo, et depuis le départ de Hurd, Fortify Software, entreprend un nouveau chapitre au terme de 63 ans d’existence.   Avec sa capitalisation boursière en chute (96,5 milliards de dollars américains ce matin), commencera-t-elle un chapitre écrit agressivement avec de l’encre couleur sang en maraudant pour tout avaler ce qui peut faire croître ses revenus et ses parts de marché ? Ou encore un chapitre écrit avec nervosité, se méfiant des prédateurs plus agressifs qu’elle ? C’est que la chaîne alimentaire est parfois assez épouvantable. Je ne vous parle pas d’IBM, de SAP, de Microsoft et d’Apple qui n’en ont rien à cirer, ou de Dell qui ne pourrait survivre à une telle goinfrerie, sans oublier les Asiatiques qui ne sauraient la manœuvrer adéquatement.   Je vous incite plutôt à réfléchir sur Oracle, si si, la boîte de Larry Ellison, alias « Crazy Larry ». Ce chevalier de l’industrie possède, selon Forbes, la sixième plus grosse fortune personnelle au monde, soit 28 milliards de dollars américains. Autodidacte maintenant âgé de 66 ans, il a lancé Oracle en 1977 et l’a dirigé, au cours des 33 dernières années, vers une capitalisation colossale de moins de 116 milliards. En comparaison, celle d’IBM est évaluée à 163,13 milliards.   1977, ça vous dit quelque chose ? Ce n’est pas qu’une date charnière pour David Bowie, les Talking Heads ou Peter Gabriel. C’est aussi l’année où :   – IBM embauchait son 300 000e employé;

– Bill Gates (22 ans) et Paul Allen (24 ans) travaillaient pour Altair par l’entremise de leur récente incorporation appelée Micro-Soft;

– Le PDG de Digital Research Inc. (DRI), Gary Kildall (37 ans), faisait breveter un système d’exploitation appelé Control Program for Microcomputers, le CP/M, sans pouvoir imaginer qu’IBM voudrait l’acquérir trois ans plus tard pour ses tout nouveaux IBM-PC …

– Tim Paterson, encore à l’école, n’écrirait le QDOS (Quick and Dirty Operating System) que trois ans plus tard, ce SE qui, sous le nom de 86-DOS, sera acheté par Microsoft huit mois après pour en faire le PC-DOS, puis le MS-DOS;

– Xerox ronronnait à plein tube avec des innovations à ne plus finir au Palo Alto Research Center mieux connu sous son acronyme PARC;

– Steve Jobs (22 ans) et Steve Wozniak (27 ans) bidouillaient dans leur garage la suite du Apple 1;

– Scott McNeally avait 23 ans et était à des lustres d’imaginer qu’il cofonderait Sun Microsystems en 1982, deux ans, du reste, avant que le couple Bosack-Lemer ne démarre Cisco;

– Borland (Turbo Pascal) n’était même pas dans le circuit, pas plus qu’Ashton-Tate (dBase);

– Rod Canion (32 ans) travaillait chez Texas Instrument et ne démarrerait pas Compaq avant 1982;

– les cinq ingénieurs d’IBM qui, en 1972, avaient lancé une binerie appelée SAP, installaient leurs pénates à Walldorf, en Allemagne;

– Tandy, Atari et Commodore présentaient, respectivement, leurs TRS-80, Atari 2600 et Commodore PET;

– HP en était alors à sa trentième année et Bill Hewlett filait ses derniers mois en tant que PDG, contrairement à Dave Packard qui se maintiendrait à la présidence du Conseil jusqu’en 1993;

– Trois nœuds Arpanet étaient interconnectés par le nouveau protocole TCP/IP;

– Gordon Moore (48 ans) et dirigeait Intel vers des lendemains qu’il jugeait alors … prometteurs;

– Les fondateurs de Google, Sergey Brin et Larry Page, avaient quatre ans, idem pour celui de Twitter, Evan Williams, alors que Jerry Yang, l’homme à l’origine de Yahoo! en avait neuf; je vous passe sous silence Mark Zuckerberg, le concepteur de Facebook, qui n’était même pas né.

Et ainsi de suite. Cela nous donne une très bonne idée de ce qu’a pu voir arriver, ou passer, Larry Ellison et, surtout, de sa « résilience » très très payante pendant toutes ces années. Mis à part le PDG d’Apple, il ne reste plus grand collègues en circulation avec qui Larry pourrait aller discuter le bout du gras autour d’une bière. Le gars était là quand tout a commencé, quand la méga config de 2010 a été inventée, et, aujourd’hui, il y est toujours, plus actif, plus fricogène que jamais. Sauf quelques rares exceptions, tous les autres grands joueurs sont arrivés après lui.   Il faut savoir que depuis 2004, Oracle a acheté une quarantaine d’entreprises, incluant PeopleSoft, Siebel, Hyperion, BEA et Sun Microsystem, ces dernières à coups de milliards. À chaque fois, la boîte à Larry s’est retrouvée en situation d’accroissement de sa part de marché, tant au chapitre des progiciels de gestion que sur celui du connecticiel. Sans compter qu’avec l’affaire Sun, elle s’est lancée dans la grande aventure du stockage et de la gestion de réseau. Son lit est donc fait pour en recevoir bien davantage.   De là à dire qu’elle pourrait être tentée par HP au point de se la farcir, quoiqu’en jugent les tribunaux antitrust, il n’y a qu’un pas et que je ne le franchirai pas. Mais on peut rêver. Rêver au sens « chérubin » ou « cauchemar » du terme ? Les pertes d’emplois résultant de la restructuration s’évalueraient en effet en milliers, cela dans un contexte économique valétudinaire particulier à la Californie. Larry Ellison n’a jamais aimé nourrir les bouches inutiles; il nourrit seulement si ça lui rapporte. Cela depuis 33 ans, sauf quelques malheureuses exceptions qui lui ont servi d’expérience.   A-t-il flairé une proie à sa taille, osera-t-il le grand coup de sa longue carrière ? Qui sait, il en est bien capable, même si un tel geste serait des plus étonnants.   Vous avez compris que l’idée n’était que pure spéculation journalistique ?

Nelson Dumais est journaliste indépendant, spécialisé en technologies de l’information depuis plus de 20 ans.

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