Échec de la transaction: BCE et Teachers retournent leurs joncs et appellent leurs avocats

Au lieu de convoler en justes noces devant l’autel, les deux parties pourraient s’affronter devant les tribunaux à propos du versement d’une indemnité de rupture de 1,2 milliard $. L’obtention d’un avis de solvabilité et les moments de signification d’intentions seraient au coeur du problème.

Tel que l’avaient envisagé des analystes et comme BCE l’avait prédit elle-même il y a deux semaines, la transaction d’acquisition de BCE par un consortium mené par Teachers, la caisse de retraite des professeurs de l’Ontario, n’aura pas lieu.

BCE, dans un communiqué, indique qu’elle a été avisée le 10 décembre en soirée que le consortium mettait fin à l’entente d’acquisition. Or, BCE affirme que le consortium a transmis l’avis de fin de l’entente de façon prématuré, ce qui constituerait un bris d’une des conditions de ladite entente.

BCE évoque la condition de l’entente selon laquelle la firme KPMG devait fournir un avis positif à un moment précis quant à sa solvabilité après la transaction, mais l’entreprise précise que c’est en matinée du 11 décembre, soit après l’annonce par le consortium de l’abandon de la transaction, que KPMG aurait confirmé son incapacité à donner une telle opinion. En clair, BCE estime que le consortium l’a avisé de la fin de l’entente avant la réception d’un avis définitif de la part de KPMG.

BCE indique que c’est elle qui met un terme à l’entente, en évoquant que toutes les clauses avaient été satisfaites à l’exception de la réception de l’avis de KPMG au moment précisé dans le contrat.

Par ailleurs, BCE précise que son conseil d’administration se penchera sur le rétablissement du versement de dividendes aux détenteurs d’actions ordinaires, en commençant avec celui du quatrième trimestre de l’année financière 2008. Selon le site de BCE, les investisseurs d’actions privilégiées ont reçu des dividendes au cours des derniers mois, mais pas les détenteurs d’actions ordinaires, qui n’ont reçu aucun dividende depuis la date de référence du 14 mars 2008 et le paiement effectué le 15 avril.

Un article publié sur le site Web de Radio-Canada, à 6h55 le 11 décembre, évoque une dépêche de l’agence de presse financière américaine Bloomberg qui rapporte une déclaration de Mark Langston, un porte-parole de BCE, à propos d’une possible réclamation auprès du consortium de l’indemnité de rupture qui avait été stipulée dans l’entente d’acquisition. M. Langston avait aussi déclaré, avant que le consortium annonce officiellement l’avortement de la transaction, que les avocats se préparaient à toutes les éventualités.

Divergence

La caisse de retraite Teachers, de toute évidence, ne voit pas les choses de la même façon.

Dans un communiqué laconique, qui a été publié en matinée sur son site Web, l’organisme qui gère la caisse de retraite des professeurs de l’Ontario déclare que l’obtention d’un avis portant sur la solvabilité de BCE après la transaction était une condition mutuellement acceptée par les deux parties, en plus de rappeler la sélection de la firme KPMG pour formuler cet avis.

Teachers indique que KPMG a conclu qu’un test requis pour l’opinion de solvabilité avait été raté, ce qui signifie que la condition mutuellement requise « ne pouvait » être satisfaite et « n’a pas » été satisfaite. Ainsi, Teachers dit avoir mis fin à l’entente et qu’en raison de ces circonstances, aucune partie ne devait d’argent à sa vis-à-vis.

Clauses problématiques

Les deux parties pourraient s’affronter en cour à propos de certaines clauses de l’entente d’acquisition.

La première clause est la clause 9.1, qui a trait à la rupture de l’entente d’acquisition. Précisément, la clause 9.1(1)(c)(ii) dit que l’acheteur peut mettre fin s’il y a un échec de la satisfaction des conditions établies à la clause 8.1 ou 8.2 de l’entente d’acquisition ou une incapacité de la satisfaction de ces conditions avant la date butoir.

La clause 8.1(f) de l’entente d’acquisition stipulait qu’une firme d’évaluation devait fournir un avis favorable à la viabilité de BCE immédiatement et après la complétion de la transaction.

Cette clause de l’amendement à l’entente finale publié le 11 juillet 2008 précisait que l’avis favorable serait émis par la firme KPMG. L’entente définitive, dans sa version publiée le 3 mars 2008, ne précisait pas à l’époque l’identité de la firme en question. Dans les deux cas, on indique que la firme était embauchée à cet effet par l’acheteur potentiel et que le choix était entériné par BCE.

Le deuxième point de discorde pourrait se situer dans l’ensemble de clauses 10.6(6), qui indiquent que la rupture de l’entente par l’une ou l’autre des parties, en fonction du non-respect de certaines clauses dans l’entente d’acquisition, se traduirait par le versement d’une indemnité de rupture par l’acheteur à BCE.

Le montant d’indemnité de rupture, inscrit dans cette clause de l’entente, avait été haussé à 1,2 milliard $ dans l’amendement de l’entente finale, alors qu’il était de 1 milliard $ dans l’entente initiale.

Discrétion

Le communiqué annonçant l’abandon de la transaction ainsi que les intentions de BCE a été publié en premier lieu vers 8 h sur le site de l’entreprise rédigé en anglais. La version française du communiqué est apparue vers 8h15 sur les fils de presse, et ensuite sur le site rédigé en français de l’entreprise.

Dans la section consacrée aux renseignements pour les actionnaires du site de BCE, dans les versions française et anglaise, on retrouvait encore, quelques heures après l’abandon de l’intention d’achat, la sous-section qui était consacrée à la transformation de BCE en société fermée. Le contenu était tel qu’il était avant l’annonce de l’échec du processus d’acquisition.

Sur le site de la caisse de retraite de Teachers, la section dédiée à la transaction était également active.

Au moment de mettre en ligne cet article, on ne trouvait aucune déclaration à propos de l’avortement de la transaction sur les sites de Madison Dearborn Partners http://www.mdcp.com/ , Providence Equity Partners http://www.provequity.com/ et Merrill Lynch http://gmi.ml.com/ , les partenaires financiers de Teachers, au moment de l’annonce par cette dernière de l’abandon du processus.

Jean-François Ferland est journaliste au magazine Direction informatique.

Jean-François Ferland
Jean-François Ferland
Jean-François Ferland a occupé les fonctions de journaliste, d'adjoint au rédacteur en chef et de rédacteur en chef au magazine Direction informatique.

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