Depuis l’apparition des premiers brevets sur les logiciels, les adeptes du modèle du logiciel libre et ceux du modèle du logiciel propriétaire sont en guerre ouverte.

En effet, certaines interventions publiques ont marqué les esprits. Par exemple, l’ancien chef de la direction du géant Microsoft, Steve Ballmer, dans une entrevue accordée au Chicago Sun Times en 2001, a qualifé Linux de « cancer ». (ref1). De son côté, le fondateur du mouvement du logiciel libre, Richard Matthew Stallman, a indiqué à la suite du décès du fondateur emblématique d’Apple, Steve Jobs, « qu’il n’était pas content qu’il soit mort, mais qu’il était content qu’il ne fasse plus partie du décor » (ref2). Ces deux annonces avaient provoqué de vives réactions de la part des membres des deux communautés mentionnées ci-haut.

La réalité d’aujourd’hui est que les entreprises utilisent des parcs applicatifs de plus en plus hétérogènes et qui se doivent d’interagir. Le logiciel libre, de par la nature de sa licence, permet cela. De sont côté, le logiciel propriétaire propose des plugins ou plugiciels afin de connecter les applications entre elles. Toutefois, ceux-ci sont souvent dispendieux et le client est dépendant du fournisseur en ce qui a trait aux choix des plugiciels qui seront développés par celui-ci.

Cependant, plusieurs signes laissent prévoir un important changement en ce qui concerne le positionnement des éditeurs de logiciels propriétaires vis-à-vis le logiciel libre en 2014.

Alors que les logiciels libres étaient systématiquement exclus des offres par le passé, on remarque aujourd’hui que des compagnies comme Microsoft, Cisco ou Oracle semblent vouloir changer leur fusil d’épaule, ou du moins c’est ce qu’elles veulent faire paraître. En effet, plusieurs initiatives ont été dernièrement entreprises par ces éditeurs qui témoignent d’une certaine ouverture.Illustration du concept de logiciel

Cisco

Depuis plusieurs années, Cisco commandite plusieurs fondations de logiciels libres, dont la Fondation Linux, la Fondation Eclipse, La Fondation pour l’Éducation dans la Sillicon Valley et la Fondation FreeBSD.

En 2012, la compagnie californienne a annoncé l’acquisition de Sourcefire pour 2,7 milliards de dollars américains. Sourcefire est la compagnie dont l’offre commerciale est orientée autour du logiciel libre de sécurité Snort. L’année suivante, Cisco est allé encore plus loin en donnant aux utilisateurs la possibilité de créer et intégrer de nouvelles fonctionnalités d’accès applicatif dans Snort grâce au langage OpenAppID.

Dans un article publié dans le site Data Security Breach, Martin Roesch, créateur de Snort et chef architecte du Security Businesss Group chez Cisco explique l’adéquation entre la sécurité et le modèle du logiciel libre :

« Le logiciel libre est très important car il permet de créer une véritable collaboration et une confiance entre les éditeurs et les experts chargés de lutter contre des menaces persistantes et avancées. En plaçant le contrôle applicatif et la visibilité en mode open source, Cisco offre à la communauté une autonomie pour lui permettre de créer des solutions techniquement supérieures afin de répondre aux enjeux de sécurité les plus complexes. »

Fin 2013, l’entreprise annonce la publication d’un codec libre H.264 libre appelé OpenH264. Ce dernier est utilisé pour la lecture en transit (streaming en anglais) de vidéo en ligne avec HTML5. De plus, Cisco s’engage à payer les frais de d’obtention de brevet pour la MPEGLA!

« L’enjeu c’est l’interopérabilité du Web, indique Marc Lijour, directeur du secteur de l’éducation, transformation de l’industrie chez Cisco. Cisco connecte tous les dispositifs, quel que soit le fabricant (Apple, Microsoft, Samsung, Google… et Cisco bien entendu). Il s’agît donc de standardiser la vidéoconférence via le navigateur avec des formats ouverts (HTML5 avec WebRTC).

« Cela distingue franchement Cisco des concurrents tels que Microsoft et Google, lesquels utilisent des standards fermés. En achetant Jabber, Cisco a poursuivi le projet libre et le support du standard XMPP. Le produit Cisco Jabber fonctionne sur toutes les plateformes (et l’annonce d’octobre concernant le h.264 confirme cette position) », ajoute-t-il.

L’ensemble des contributions de Cisco aux communautés de logiciels libres est présenté dans une section de son site Internet.

Microsoft

En 2009, Microsoft a créé la Fondation Outercurve. Initialement appelée « CodePlex », cette organisation à but non lucratif a comme mission de faciliter l’échange de code et la compréhension entre les sociétés éditrices de logiciels et les communautés de logiciel libre.

Au cours des dernières années, la multinationale dont le siège social est localisé à Seattle a mis en place plusieurs stratégies relatives au logiciel libre. Mentionnons notamment le lancement de la filiale Microsoft Open Technologies, qui s’attarde sur des différents sujets dont l’interoperabilité, les standards ouverts et le logiciel libre. La structure travaille avec plusieurs organisations dont le W3C, l’IETF, l’OASIS, le DMTF et des communautés de logiciels libres telles JQuery, MongoDB, Apache Cordova, Apache, Outercurve, Eclipse, Node.js et Github.

Ce changement de positionnement se reflète dans la stratégie déployée par le géant américain pour la commercialisation de ses périphériques et services qui mettent l’emphase sur l’infonuagique, avec la plateforme Windows Azure. Cette dernière supporte plusieurs logiciels libres et, selon le fabriquant, cette liste ne cesse de grandir.

« Microsoft est engagée plus que jamais à l’Ouverture [Openness]. Nous influençons, contribuons et signons des partenariats avec des communautés de logiciels libres quotidiennement. Nous traversons une phase qui est très excitante et nous souhaitons continuer à aider nos partenaires et clients à devenir plus ouverts », précise Keith Loo, directeur de pratique des plate-formes ouvertes chez Microsoft Canada.

Plus d’information concernant l’implication de Microsoft dans le logiciel libre est disponible ici.

Lire la suite de ce billet : Des éditeurs propriétaires plus libres? (2/2)